on 15 septembre 2025 at 3:39 PM Interview – Le Général Hintzy fait le bilan de ses trois mois à la tête de la mission de l’OTAN en Irak​

Republié via Innoreader Read More

 

J : Mon général, pourriez-vous nous rappeler brièvement votre parcours professionnel ?

– J’ai commencé ma carrière en intégrant l’Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr Coëtquidan en 1989.  Après ma formation initiale, j’ai choisi l’arme blindée-cavalerie et j’ai servi dans plusieurs régiments, allant des unités légères de reconnaissance au commandement d’un régiment de chars. 

Au cours de ma carrière, j’ai été déployé à plusieurs reprises en opérations, notamment en ex-Yougoslavie, en Albanie, au Tchad, en Haïti, en Côte d’Ivoire, au Liban, en Afghanistan et au Mali. 

Ces expériences m’ont permis de développer une solide expertise opérationnelle et d’affiner mes compétences en matière de gestion de crise, notamment en tant que commandant du groupement tactique blindé lors des événements post-électoraux en République de Côte d’Ivoire en 2010-2011.

Diplômé de l’École de guerre canadienne en 2006, j’ai occupé différents postes à l’état-major français de planification et de conduite des opérations, notamment sur les opérations au Moyen-Orient. J’ai également occupé plusieurs postes à l’étranger, notamment en tant qu’adjoint au commandant des forces françaises aux Émirats arabes unis de 2016 à 2019. 

À l’été 2019, je suis rentré à Paris pour occuper le poste de chef d’état-major de l’inspection de l’armée de Terre. En août 2022, après ma promotion au grade de général, j’ai été déployé à Tampa, en Floride, aux États-Unis, pour une mission de deux ans en tant que représentant national et chef de la mission militaire française auprès de l’USCENTCOM (United States Central Command). 

À l’été 2024, j’ai été nommé inspecteur de l’armée de Terre et, en novembre 2024, j’ai participé au cours pour officiers généraux et ambassadeurs au Collège de défense de l’OTAN à Rome.

J : En quoi votre carrière vous a-t-elle aidé dans votre rôle actuel de commandant de la mission de l’OTAN en Irak ? 

Tout au long de ma carrière, j’ai acquis une riche expérience qui m’a permis de développer des compétences essentielles pour cette fonction. Toutefois et de manière plus générale, j’ai très tôt développé un vif intérêt pour le Moyen-Orient. J’ai commencé à lire beaucoup sur la région, en particulier sur l’Irak. Cela a grandement encouragé ma motivation à m’engager dans cette partie du monde. 

Après avoir servi dans plusieurs régiments de l’arme blindée-cavalerie et participé à de nombreuses opérations à l’étranger, j’ai pu affiner mes compétences en matière de commandement opérationnel. Ces missions m’ont permis de comprendre la dynamique complexe des conflits et des opérations internationales. 

Pendant les trois années que j’ai passées au Moyen-Orient, j’ai mené de nombreuses activités et exercices conjoints avec les forces armées de la région, ce qui m’a permis d’améliorer ma compréhension des enjeux liées aux relations internationales et à la coopération militaire. 

Cette riche expérience m’a permis de développer des compétences particulières en matière de diplomatie militaire et de coordination avec les partenaires internationaux, ce qui est crucial pour ma mission actuelle en Irak.  Mon séjour aux Émirats arabes unis m’a également permis de mieux comprendre le Moyen-Orient, ses cultures et ses enjeux spécifiques, ce qui est essentiel pour appréhender les complexités et les défis de ma mission en Irak.

Ensuite, pendant mes deux années à Tampa, je me suis concentré sur les préoccupations de la région Proche et Moyen-Orient, en particulier l’Irak, la transformation de la Coalition internationale Operation Inherent Resolve (OIR) et les questions liées à la mission de l’OTAN en Irak. 

Mon travail à l’état-major d’USCENTCOM m’a également permis de développer une connaissance fine et approfondie des dynamiques régionales et des relations avec les pays partenaires. 

Ces expériences cumulées m’ont permis d’acquérir une vision stratégique et une expertise opérationnelle essentielles pour diriger efficacement la mission de l’OTAN en Irak. Elles m’ont également permis de développer de précieux réseaux de contacts internationaux pour la coordination et la coopération avec les partenaires de l’OTAN et les parties prenantes locales. 

La vaste expérience que j’ai acquise dans la région, grâce à ces missions, est un atout majeur pour comprendre les nuances culturelles, politiques et sécuritaires de la région.

J : Après trois mois passés à la tête de la mission de l’OTAN en Irak, quel bilan pouvez-vous déjà dresser de la mission et de la situation dans ce pays ?

Après trois mois à la tête de la mission de l’OTAN en Irak, je peux, en effet, déjà tirer un premier bilan à la fois de la mission et de la situation sécuritaire. 

Tout d’abord, je tiens à saluer l’excellent travail de mes prédécesseurs, qui ont jeté des bases solides pour conduire cette mission. Leur engagement et leurs efforts ont été essentiels pour nous amener là où nous en sommes aujourd’hui. 

Toutefois, il nous reste encore beaucoup à faire pour aider nos amis irakiens à construire un avenir plus sûr et plus stable. 

Je tiens également à souligner que j’ai été impressionné par le niveau de sécurité à Bagdad. Cela démontre les efforts considérables déployés par les forces de sécurité irakiennes et nos partenaires internationaux pour assurer la stabilité en Irak. 

Cependant, il est clair que le pays est encore confronté à d’importants défis. La situation régionale en matière de sécurité reste précaire et les tensions politiques et communautaires continuent de susciter des inquiétudes. Néanmoins, il y a aussi des signes encourageants de progrès. Le gouvernement irakien s’est efforcé de promouvoir la réconciliation nationale et d’améliorer les services publics, ce qui est essentiel pour construire une paix durable.

Sur le plan opérationnel, je m’efforce de changer l’état d’esprit de la mission de l’OTAN en Irak, ce qui n’est pas chose aisée. Ma première orientation a été d’adapter nos mesures de protection à un niveau approprié, en conciliant le besoin de sécurité avec les impératifs de notre mission. 

Nous devons nous assurer que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour accroître nos contacts avec les Irakiens. Le renforcement de ces engagements est essentiel pour instaurer la confiance, approfondir la coopération et réaliser des progrès significatifs dans notre mission de conseil.

À cet égard et en coordination avec mes homologues irakiens, j’ai réussi à ouvrir des bureaux de l’OTAN dans leurs principaux quartiers généraux afin de maximiser notre temps à leur profit. Des contacts plus longs entre les conseillers de la mission et leurs homologues irakiens sont la clé de notre réussite commune. Pour les conseillers de NMI, je donne deux directives obligatoires qu’ils doivent suivre en permanence : le respect de la souveraineté du pays et la connaissance de la culture et de l’histoire irakiennes, qu’ils doivent toujours respecter et prendre en compte lorsqu’ils mènent leurs activités de conseil. 

Pour dynamiser la mission, je réexamine également les objectifs à long terme de notre mandat. Il est important de veiller à ce que nos objectifs soient clairs, réalistes et conformes aux besoins actuels et futurs de l’Irak. Cela implique une évaluation continue de nos programmes de formation et de conseil, ainsi qu’une adaptation de nos stratégies en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain.

En tant que mission non combattante, la mission de conseil est la tâche essentielle de la mission de l’OTAN en Irak. Pour cela, NATO Mission Iraq a besoin du soutien continu des pays contributeurs en troupes de l’Alliance et de leurs ambassadeurs pour remplir les tâches de la mission.

J : Comment voyez-vous l’avenir de la mission de l’OTAN en Irak ?

Il est essentiel de continuer à investir dans le conseil aux forces de sécurité et aux institutions irakiennes. Nous sommes ici à la demande des irakiens, et il est de notre responsabilité de répondre à l’évolution de leurs besoins. 

Nous sommes en train de revoir notre organisation interne afin de mieux nous aligner sur les priorités qu’ils ont identifiées et de mieux les soutenir. Ces priorités comprennent la cyber sécurité, la gestion des crises et des catastrophes, ainsi que l’éducation et la formation des sous-officiers.

Le rôle central de la mission de l’OTAN en Irak est également de fournir des conseils au niveau ministériel. En travaillant directement avec les ministères irakiens de la Défense et de l’Intérieur, nous sommes en mesure de fournir un soutien stratégique et technique essentiel pour renforcer les capacités institutionnelles et opérationnelles.

Ce processus de conseil ministériel est essentiel pour aider les autorités irakiennes à prendre des décisions éclairées et à mettre en œuvre les réformes nécessaires pour améliorer la sécurité et la gouvernance de leurs institutions. Comme je le disais précédemment, il est de notre devoir d’ajuster les objectifs à long terme de la mission et de veiller à ce qu’ils soient réalistes, mesurables et alignés sur les priorités du gouvernement irakien. 

Notre but ultime est que l’Irak atteigne son plein potentiel en termes de sécurité et de stabilité, ce qui entraînera des améliorations économiques et sociales au profit de tous les Irakiens.

Nous aspirons également à ce que l’Irak devienne un partenaire à part entière et à long terme de l’OTAN dans la région. 

C’est pourquoi l’avenir de la mission de l’OTAN en Irak nécessitera un engagement continu et une grande flexibilité. Nous devons être prêts à adapter nos stratégies en fonction des développements sur le terrain et de l’évolution des besoins de nos partenaires iraquiens. 

Cela implique une communication ouverte et régulière avec les autorités irakiennes et l’OTAN.

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