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Désolation sur Mayotte en matinée du 14 décembre après le passage de Chido – Twitter @InfosFrancaises
Comme annoncé dans notre récente actualité (>>), les regards étaient tournés en cette fin de semaine vers l’océan Indien, et notamment vers le département d’Outre-Mer de Mayotte, sous la menace du cyclone intense nommé CHIDO.
Après avoir évolué en tempête tropicale le 9 décembre dernier, celui-ci s’est fortement renforcé en frôlant la pointe nord de Madagascar, devenant les 11 et 12 décembre un puissant cyclone de catégorie 4. Après un léger affaiblissement (catégorie 2), ce cyclone a repris en vigueur durant la nuit du 13 au 14 décembre, juste avant d’impacter l’archipel de Mayotte.
Trajectoire observée et prévu du cyclone Chido – Weather Underground
Malheureusement, les grandes inquiétudes sur sa trajectoire se sont produites. L’œil de ce cyclone, alors en catégorie 3, a fini par traverser de part en part le département d’Est en Ouest en matinée de ce 14 décembre, ce qui ne s’était pas produit sur Mayotte dans l’histoire moderne récente.
Oeil du cyclone Chido centré sur Mayotte en matinée du 14 décembre 2024 – Satellite meteosat9 via TropicalTidbits
Si les vents se sont petit à petit renforcés au cours de la nuit, ils se sont soudainement déchaînés en matinée de ce 14 décembre lors du passage du mur de l’oeil. Pendant plus d’une heure, des rafales supérieures à 200km/h ont été relevés à l’aéroport international de Dzaoudzi – Pamandzi, avant une rafale maximale de 226km/h peu après 07h TU (10h locales) et 155km/h de vents moyens, un record historique sur Mayotte.
A noter qu’une autre station a observé 194km/h à Ouangani, avant la perte de données.
Alors que ce cyclone vient tout juste de s’éloigner, les informations ne remontent qu’au compte goutte sur place, en raison de la coupure de la plupart des réseaux (téléphoniques, électriques…). Il n’est donc à l’heure actuelle pas possible d’effectuer un bilan humain.
Toutefois, les quelques images qui nous parviennent laissent augurer un véritable désastre matériel. Des dégâts inestimables avec la plupart des infrastructures endommagées voire détruites, dans ce département ou 77 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté national et où les habitations sont en grande majorités composées de taules peu résistantes à ces conditions météorologiques.
Dégâts majeurs sur Mayotte ce 14 décembre 2024 à Mamoudzou – Mayotte la 1ere
Destructions après le passage du cyclone Chido dans la commune de Kawéni (Mayotte) – 14 décembre 2024 – Twitter @Donpfull
Contrairement à l’île de la Réunion, Mayotte a été relativement épargnée par les puissants cyclones ces dernières décennies. Dans le cas de Chido, il s’agit en effet d’un cyclone d’une ampleur inédite sur le département depuis au moins 90 ans.
Il faut en effet remonter à la fin du mois de février 1934 lors du passage du cyclone DISSELI, où les vents ont été estimés au moins à 160km/h (contre plus de 220 ce samedi). Les témoignages évoquent que la ville de Dzaoudzi aurait été rasée à l’exception de la « Résidence » du préfet. Les villages de Mtsapéré, Pamandzi, Bouéni et Mzouazia auraient aussi étaient détruits ; les ravages dans les cultures ont entraîné une famine. Le cyclone a été nommé en hommage à M. Disseli, colon de l’époque qui a mis en place l’aide alimentaire à Mayotte.
Dégâts dans le parc de la Résidence du Gouverneur après le passage du cyclone Disseli en février 1934 – Saïd Hachim, ©BulletinMahabari n°1
Le 10 avril 1984, c’était au tour du cyclone KAMISY de frapper Mayotte, passant à 50 kilomètres au sud de Pamandzi puis à 25km au Sud de Grande-Terre, occasionnant de nombreux dégâts sur les cultures et habitations. Les rafales ont atteint jusqu’à 148km/h à Pamandzi, avec une houle cyclonique de 5 à 8 mètres. Le total des dégâts a été estimé à l’époque 168 millions de francs, soit le budget annuel total de la collectivité. Une personne est décédée à son passage, et l’on décomptait 20 000 mahorais sinistrés. Le réseau téléphonique avait été endommagé à 70% et le réseau électrique est resté coupé durant deux journées.
Destructions dans les localités de Malamani et de Sada après le passage du cyclone Kamisy le 10 avril 1984 – ©AD Mayotte-26w2 / Jean Jusseaume)
Seulement un an après, les 15 et 16 février 1985, c’est la tempête tropicale FELISKA qui touchera durement Mayotte. Si les vents ont été plus limités (126km/h à Pamandzi), les pluies ont été très abondantes (239.5 mm à Mamoudzou dans la nuit du 15 au 16, et 575 mm à Dzoumogné). Cette tempête a occasionné de nombreuses inondations et glissements de terrain, notamment sur le secteur de Kaweni totalement inondé. Les dégâts étaient estimés à 60 millions de francs, dont 40 millions rien que pour le réseau routier.
Trajectoire de la tempête tropicale Feliska en février 1985 – Source : Météo Tamarins
Plus récemment, le cyclone HELLEN était passé au large de Mayotte fin mars 2014. Si sa distance n’avait pas provoqué de vents tempétueux (89km/h à Pamandzi), les cumuls de pluie avaient là aussi impliqué de nombreux phénomènes de glissements de terrain et d’inondation, en particulier pour les communes d’Acoua, Bandraboua, Kougou et Mtsamboro. On relève à son passage de 287mm à Mtzamboro et 195mm à Bandraboua.
Cyclone HELLEN le 30 mars 2014 entre Mayotte et Madagascar – Satellite Terra / NASA
Inondations dans la commune d’Acoua durant le cyclone Hellen – 30 mars 2014 – photographie ©Mairie d’Acoua
Sans commune mesure, les deux derniers systèmes tropicaux qui avaient menacé Mayotte remontent à l’année 2019 avec le passage de KENNETH le 23 avril 2019 à environ 200km au nord du département, puis huit mois plus tard le cyclone BELNA à environ 120km à l’Est de l’archipel le 8 décembre 2019 (finalement épargné, mais 15000 habitants avaient été hébergées préventivement dans des centres d’hébergement).