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Une activité cyclonique importante sur l’Atlantique ces dernières semaines
L’activité cyclonique est importante ces derniers jours sur le bassin atlantique. Alors que l’ex-ouragan Kirk a durement frappé la France en milieu de semaine après avoir effectué sa transition extratropicale, l’Ouest de la Floride fut durement touché en fin de journée de mercredi par l’ouragan Milton, environ deux semaines à peine après que le Nord-Ouest de la région ait subi le passage de l’ouragan Helene, qui s’était échoué sur le Nord-Ouest de l’État en catégorie 4 le 26 septembre dernier.
Images satellite des ouragans Helene et Milton sur la Floride – via NOAA
Depuis la fin du mois de septembre dernier, ce sont pas moins de 6 systèmes tropicaux qui ont été observés sur le bassin atlantique, un net regain d’activité après une saison cyclonique relativement « calme » malgré les prévisions des organismes spécialisés.
Évolution de l’activité cyclonique sur le bassin atlantique depuis le mois de juin 2024 – via Wikipedia
Des conditions très favorables aux ouragans sur l’Atlantique depuis la fin du mois de septembre
Un tel regain d’activité en cette période de l’année après des mois d’août et septembre relativement peu actifs est assez peu fréquent. Celui-ci fut toutefois favorisé par le retour de conditions plus favorables à la formation de ce type de phénomène ces deux dernières semaines à l’échelle du bassin mais également par des températures de la surface de l’Atlantique-Nord particulièrement élevés pour la période.
Anomalies de températures de surface des océans au 26 septembre 2024 – via Climate Reanalyzer
Ces températures des eaux de surface particulièrement élevées sont d’ailleurs situées au-dessus des précédents records records depuis maintenant près de 2 ans sur le bassin Atlantique-Nord, une tendance qui se retrouve également à l’échelle de la planète.
Évolution annuelle des températures de surface de l’Atlantique-Nord depuis 1981 – via Climate Reanlyzer
Or, des eaux de surface plus chaudes offrent, lorsque les conditions le permettent en altitude (faible cisaillement verticaux), un carburant important pour le renforcement rapide de ces phénomènes tropicaux. Ce fut d’ailleurs le cas pour l’ouragan Milton, qui a observé une phase de renforcement exceptionnelle en début de semaine dans le golfe du Mexique, passant du stade de simple tempête tropical à ouragan de catégorie 5 en moins de 24 au large du Yucatán.
Intensification extrêmement rapide de l’ouragan Milton dans le golfe du Mexique cette semaine – Via CIRA
Celui-ci fut également l’un des ouragan avec la plus basse pression jamais observée dans le bassin Atlantique depuis le début des relevés météorologiques, adoptant une pression minimale de 897 hPa le 8 octobre.
De plus, ce fut également la première fois depuis le début des relevés météorologiques que 3 ouragans simultanés (Kirk, Leslie et Milton) furent observés durant le mois d’octobre sur le bassin Atlantique-Nord, un phénomène qui ne se rencontre en général que plus tôt durant la saison.
3 ouragans simultanés sur l’Atlantique ce 7 octobre 2024 – Via NOAA
Un lien avec le réchauffement climatique ?
L’activité cyclonique est donc marquée pour un début octobre sur le bassin, les températures particulièrement élevées de la surface des océans se montrant favorable à leur formation, renforcement et maintient. Si ces températures exceptionnelles sont effectivement en lien avec le réchauffement climatique, celles-ci se situant au-dessus des précédents records de la période, doit-on forcément imputer l’activité cyclonique de ces dernières semaines à celui-ci ?
L’arrivée de l’ex-cyclone Kirk sur l’Europe et la France a été attribuée par de nombreux médias au réchauffement climatique. Toutefois, il est important de noter que ce phénomène n’est pas nouveau et a été observé de nombreuses fois par le passé.
En effet, l’impact d’ex-cyclones tropicaux sur l’Europe et la France survient quasiment chaque année, notamment durant l’automne. Toutefois, ceux-ci atteignent notre continent après avoir effectué leur transition extratropicale, c’est à dire qu’ils perdent leurs caractéristiques tropicales et deviennent alors de « simples » dépressions tempérées, pouvant tout de même engendrer des phénomènes virulents (vents puissants, fortes pluies, …) mais différant grandement des cyclones tropicaux.
Trajectoire de tous les ouragans entre 1980 et 2005 – Aucun d’entre eux n’a touché l’Europe avec toutes ses caractéristiques tropicales – WikipediaCOMMONS
Il peut toutefois arriver que des cyclones tropicaux s’approchent fortement de notre continent, comme ce fut le cas en octobre 2017 lorsque l’ouragan Ophelia s’était approché de la péninsule ibérique en tant qu’ouragan avant de toucher les îles britanniques après avoir effectué sa transition extratropicale.
Ophélia au large de l’Europe le 15 octobre 2017 – Sat24
L’impact d’un ex-ouragan n’est donc pas nouveau sur l’Europe et aucune étude n’a pour le moment pu dégager une augmentation de ces transitions extratropicales vers notre continent durant l’automne en lien avec le réchauffement climatique. Néanmoins, l’épisode pluvieux associé à l’ex-ouragan Kirk fut exceptionnel sur une large moitié Nord de la France, certains cumuls en 24h se montrant inédits depuis le début des relevés météorologiques. Cet aspect exceptionnellement pluvieux est quant à lui lié au réchauffement climatique. En effet, un air plus doux/chaud peut contenir plus d’humidité qu’un air plus frais et chaque degré supplémentaire à l’échelle de la planète équivaut à une augmentation de 7% du taux d’humidité atmosphérique.
L’ex-ouragan Kirk s’est accompagné d’un air particulièrement humide venu de l’Atlantique, issu une nouvelle-fois d’une rivière atmosphérique d’origine tropicale, ce qui a favorisé la survenue de ces importantes précipitations, cet air humide circulant en plus au-dessus d’un océan anormalement chaud pour la période. Si on ajoute à cela la situation de blocage que subit la France depuis maintenant un an avec l’influence d’un flux océanique très humide et perturbé, les conditions étaient réunies pour la survenue d’un épisode pluvieux majeur et d’inondations importantes, favorisées par le réchauffement climatique.
Rivière atmosphérique d’origine tropicale accompagnant l’ex-ouragan Kirk sur la France – via meteo60.fr
Concernant la Floride, qui a donc subit 2 impacts d’ouragans majeurs en environ 2 semaines, là encore, le lien avec le réchauffement climatique n’est pas flagrant. Même si ces impacts sont très rapprochés dans le temps, cette région des États-Unis est régulièrement touchée par des cyclones, et ce même durant le mois d’octobre.
Impacts de cyclones sur les États-Unis en octobre entre 1851 et 2021 – weather.com
L’activité cyclonique est en effet encore marquée en cette période de l’année sur le bassin Atlantique après avoir atteint un pic autour de la mi-septembre, il n’est donc pas rare d’observer des phénomènes tropicaux durant cette période sur le bassin ou que ceux-ci impactent les terres.
L’ouragan Wilma touche la Floride à la fin du mois d’octobre 2005 – Via NOAA
Le réchauffement climatique a néanmoins favorisé, comme évoqué précédemment, un renforcement extrêmement rapide de l’ouragan Milton dans le golfe du Mexique entre le 7 et le 8 octobre dernier ainsi que la formation de 3 cyclones simultanés sur le bassin au début du mois d’octobre, ce qui n’avait jamais été observé avant en cette période. Les eaux particulièrement chaudes pour la période ont en effet offert un carburant important pour la formation et le renforcement de ces systèmes.
Le changement climatique entraîne en effet des cyclones plus nombreux mais également plus puissants à l’échelle de la planète, ceux-ci profitant d’une énergie toujours plus élevée en liaison à la température des eaux de surface. Selon une étude, les précipitations totales des ouragans sont également plus intenses en lien au réchauffement climatique. Ce fut par exemple le cas pour Katrina, Irma, Maria, Harvey, Dorian et Florence, phénomènes durant lesquelles les pluies ont toutes été rendues plus intenses (de 4%, 6%, 9%, 15%, 7,5% et 5%, respectivement) par le changement climatique.
Dégâts suite au passage de l’ouragan Irma en 2017 sur l’île de Saint-Martin – Via La Dépêche
Le constat fut d’ailleurs également visible pour l’ouragan Helene à la fin du mois de septembre dernier. Une récente étude scientifique a en effet mis en évidence que les vents et les pluies accompagnant ce système ont été rendus environ 10 % plus intenses par le changement climatique. Les conclusions de cette étude ont également suggéré que le réchauffement climatique a rendu des ouragans comme Hélène 2,5 fois plus probables dans cette région du globe. Autrement dit, au lieu d’être observés tous les cent trente ans, des ouragans aussi puissants sont désormais susceptibles de se produire tous les cinquante-trois ans en moyenne.